dimanche 31 janvier 2016

10 conseils pour son potager écologique


    Pourquoi un potager écologique? Pour ne pas nous empoisonner nous-mêmes, ne plus avoir à « bêcher » le sol, ne plus avoir besoin de fertilisant chimique ou de compost préparé, ni d'herbicide, ni de traitement qu'il soit chimique ou biologique, pour travailler avec et non contre la Nature.

Une vraie révolution dans notre potager qui nous demande de prendre de nouveaux repères :


 Arrêtons  : labour, traitements, compost, herbicides
 Couvrons toujours le sol
 Semons sur le sol
 Mélangeons nos cultures
 Mélangeons soucis et oeillets d'inde parmi nos cultures et installons des plantes aromatiques proches
 Ayons toujours des fabacées parmi nos légumes
 Contrôlons naturellement ou astucieusement limaces, escargots, mulots et autres rongeurs
 N'arrachons jamais les racines des plantes cultivées.
 Contrôlons les herbes dès leur naissance.
 Complétons ces quelques repères avec Emilia Hazelip et Jean-Marie Lespinasse


Plus en détails :


Arrêtons  :
le labour (bêchage), même superficiel
tout traitement chimique ou biologique
tout compost préparé* et tout fertilisant chimique
tout herbicide.

C'est la règle numéro 1, la plus déroutante et pourtant la plus essentielle !
* sauf cas exceptionnel d'une terre très pauvre ou non fonctionnelle (aide à l'installation d'arbres par exemple).

Note 1 : ne tassons pas le sol nous-mêmes ! Des zones cultivées de 1m20 de large maximum permettent de ne pas y entrer.
Note 2 : un dernier labour peut être nécessaire si notre sol est compacté.
Note 3 : L’abandon des traitements nécessite une couverture du sol (règle numéro 2).

Couvrons toujours le sol, d'une couverture de 1 à 20 cm d'épaisseur réalisée avec une matière biodégradable : paille, feuilles, foin sans graine, tonte de gazon séchée, débris forestier, laine de mouton, ... On peut étaler de la sciure à condition de la pré-composter 1 an dehors sinon elle acidifie le sol.

Note 1 : Adaptons l'épaisseur à la hauteur de nos légumes. Une petite graine semée doit pouvoir sortir la tête de la couverture. La couverture disparaît au fil des semaines en nourrissant les organismes du sol, veillons au moins à ce que le sol ne réapparaisse pas à la vue du soleil brûlant ou de la pluie forte. L'hiver cette couverture protège aussi du gel.

Note 2 : Pour cette couverture les feuilles seront  fournies par une haie proche de nos cultures. De plus, cette haie renforcera l'équilibre biologique. Par ailleurs une haie au Nord freine les vents froids et puissants venant de cette direction. Les petites feuilles recouvrent moins les jeunes pousses de légumes : érable champêtre, frêne, saule pleureur, pêcher, amandier, aubépine, argousier, sureau, troène vulgaire, bouleau, ...

Note 3 : la règle numéro 1 ne fonctionne pas sans cette règle numéro 2.
Semons sur le sol : recouvrir les petites graines (radis, salade, carotte, panais, mâche, épinard, ...) de 1 cm maximum de paille et assurer de maintenir l’humidité ou au moins la fraîcheur* le temps de la germination. Ensuite irriguer avec un tuyau goutte à goutte préalablement installé sous la couverture et laissé à demeure.

Note : Pour les graines plus grosses (petits pois, haricots, fèves) mettre 3 à 5 cm de paille et plus, cela demandera moins d'arrosage puisque la fraîcheur sera mieux préservée. Ces grosses graines peuvent aussi être enterrées par 6 graines en un seul trou (technique du poquet) ou enfoncées dans le sol (fève).

* cela est fonction des pluies et de la chaleur :-). Vous pouvez compenser le manque d'humidité autour de la graine par un arrosoir le soir venant où en assurant de recréer momentanément la pluie avec de petits asperseurs.

Mélangeons nos cultures. Comment ? Plus il y a de plantes, plus leur diversité aérienne et souterraine empêchera le développement des parasites. Par ailleurs les plantes vivent en échangeant des nutriments au niveau de leurs racines avec les organismes du sol. Si elles les nourrissent de façon diversifiée, ces organismes se développent d'autant et par effet retour ils alimentent mieux les plantes (effet de synergie). En dehors de quelques erreurs de mélange à ne pas faire, nous pouvons tout mélanger. Simplement : plantons et semons en prévoyant la place suffisante pour que notre légume se développe.

Mélange à éviter selon certains auteurs :
- Crucifère (chou, chou-rave, ...) avec fraisier    - Fabacée (fève, haricot, pois, ...) avec alliacée (surtout oignon)
- Melon avec Curcubitacée (potiron, courge, ...)    - Fenouil avec tous les légumes (le cultiver seul ou avec aromatiques)
- Chou-rave avec tomate               - Concombre avec haricot    - Un légume avec d'autres légumes de la même famille

A éviter :
- De remettre au même endroit le même légume deux années de suite.

Mélanges connus pour leurs réussites, ne pas se limiter à ceux-ci :
- Fraisier ET fabacée ET alliacé (à distance des fabacées)    - Crucifère (chou) ET fabacée ET salade ET céleri
- Mâche ET tous légumes                    - Epinard ET tous légumes
- Carotte ET tomate ET panais ET salade ET salsifis ET radis ET alliacée ET coriandre ET fabacée
- Maïs ET haricot grimpant ET cucurbitacée                    - Tomate ET oeillet ET soucis ET basilic ET fabacée

 Mélangeons soucis* et oeillets d'inde* parmi nos cultures et installons des plantes aromatiques proches: thym, sauge, romarin, tanaisie (envahissant), sarriette vivace, lavande, ... Participant à empêcher le développement des parasites de façon très efficace, elles complètent l'effet du mélange de nos légumes.

* ils se ressèment tout seuls. Réduire leur nombre par arrachage si besoin.

Note 1 : une petite mare d'au moins 1m ou 1m50 de diamètre est aussi la bien venue pour la biodiversité. Pensez à avoir des bords en pente douce, certains insectes ont du mal avec les pentes abruptes. Installez par exemple une planche posée sur le rebord et plongeant dans l'eau. Essayez aussi de faire un fond de mare qui remonte vers la surface en plusieurs paliers (étages). Cela aidera différentes végétations et différents insectes. Au plus profond : 50/70cm minimum.

Ayons toujours des fabacées parmi nos légumes : fève, haricot, pois, luzerne... doivent se succéder mois après mois parmi nos autres cultures. Cette famille de plantes permet d'amener naturellement de l'azote aux autres légumes.

Note 1 : la règle numéro 2 a besoin de cette règle numéro 6 pour bien fonctionner car souvent la couverture n'apporte quasiment pas d'azote bien qu'elle apporte les autres fertilisants (minéraux et oligo-éléments).

Note 2 : semer des poquets de luzerne tous les 1m50. La luzerne perdure 10 ans. D'après Jean-Marie Lespinasse, en plus de capter l'azote de l'air, elle remonte des minéraux de grandes profondeurs. Ces minéraux et l'azote se retrouvent alors dans les racines, feuilles et tiges de la luzerne. Afin que  nos légumes en bénéficient, on coupe les tiges de luzerne que l'on laisse au sol. Comme la luzerne repousse, on peut répéter l’opération 2 à 3 fois par an avant la floraison (voir le livre de Jean-Marie Lespinasse « jardin naturel »).

Contrôlons naturellement ou astucieusement limaces, escargots, mulots et autres rongeurs. Avouons-le, ces mangeurs de légumes aiment bien se mettre sous la couverture !

Pour les limaces et escargots : heureusement cette couverture élève aussi certains de leurs prédateurs : carabes, crapauds, ... ! Le non labour et le zéro traitement sont essentiels aux carabes qui nichent dans le sol de nos cultures. Ils ont également besoin de zones d'herbes sauvages en bordure de nos cultures. Pour les autres prédateurs, installons proche des abris à hérissons (gros tas de branches+feuilles), à lézards (tas de pierres), ... et des petites mares pour la reproduction des crapauds, etc.

Pour les mulots et autres rongeurs, ne crions pas au secours dès les premiers dégâts, car ces rongeurs mangent aussi des insectes nuisibles et, pour certains, des escargots. Si nous estimons qu'ils prélèvent une trop grande part des légumes, favorisons leurs prédateurs : rapaces de jour comme ceux de nuit. Leurs abris sont essentiellement les haies, les arbres creux ou encore des niches dans les bâtiments. Des pieux de 3m de haut dans le jardin leur permettent de mieux surveiller vos cultures. Il reste aussi une solution efficace : le chat. Toutefois il peut faire beaucoup de dégâts parmi les oiseaux, donc pas trop de chats !

Note 1 : prévoir une bande sauvage de 2 m de largeur par exemple, sans intervention autre que celle nécessaire pour éviter l’envoi  des graines dans nos cultures... Il suffit de les faucher en fin de floraison et de les laisser au sol .

Note 2 : si nous le pouvons, par sécurité en cas d'hiver doux, adaptons nos zones de culture au parcours temporaire de grands prédateurs comme un ou deux canards. Au printemps les autres prédateurs seront de retour.

Note 3 : En attendant que l'équilibre entre limaces et prédateurs se stabilise à un niveau acceptable, organisons nous de façon astucieuse :
Plantons au printemps des salades rouges et évitons de planter des légumes trop jeunes (trop petits, trop tendres, ...). Installons des planches ou cartons proches des légumes : limaces et escargots se réfugient dessous, il ne reste plus qu'à les cueillir et à les donner aux canards ou à les emmener en forêt. Il existe aussi des barrières anti-limaces en tôle recourbée.

N'arrachons jamais les racines des cultures terminées*. Elles nourrissent les organismes qui les biodégradent et laissent à leur place un sol micro-aéré. Cela permet  aussi de restituer au sol une partie des fertilisants que la plante a utilisée pendant sa croissance. De même, laissons au sol les autres résidus de cultures (feuilles, tiges).

* Sauf celles consommées !

Note 1 : Si ces résidus de cultures gênent les autres cultures (grandes feuilles de choux par exemple), les laisser dans les allées, elles y alimenteront aussi les organismes du sol (verres de terre, cloportes, ...), et seront quand même bénéfiques aux cultures. Si cela fait « sale », mettre un peu de paille par dessus.

Note 2 : la règle numéro 1 (non labour) fonctionne bien mieux avec cette règle numéro 8 !

Contrôlons les herbes dès leur naissance en les arrachant dés que possible. En tout cas veillons à ce qu'elles ne  grainent pas. Veillons aussi aux herbes dans les bandes sauvages en bordure, certaines envoient leurs graines par le vent : on les fauche à la fin de leur floraison et on les laisse sur place. Grâce à ce contrôle la présence d'herbes diminue chaque année parmi nos cultures.

Note 1 : la couverture du sol participe aussi au contrôle de l'herbe. Par ailleurs, le fait de ne pas labourer permet de ne pas remonter les graines enfouies dans le sol. Car... si un labour détruit des herbes, il peut ensemencer les prochaines...

Note 2 : pour reprendre en main une zone très enherbée (pelouse par exemple), sans labour ni grattage de la surface du sol, on place plusieurs mois sur le sol des cartons qui se chevauchent d'au moins 20 cm. Recouverts de 20cm de paille ou à défaut de bâche, et lestés par quelques branches ou pierres contre les grands vents, ces cartons font mourir l'herbe et stimulent les verres de terre, les mulots, ... Ceux-ci vont labourer le sol. Il nous reste ensuite à bien le reprendre en main et à ne plus le compacter, ... pour ne plus être envahi par les herbes indésirables.

Note 3 : pour les herbes vivaces : rumex, chardons, chiendent, liseron, ... : c'est à voir au cas par cas. Si c'est une invasion, il est préférable de choisir un autre lieu pour son potager en attendant que cela se règle ou alors supporter leur présence. Car manifestement ces plantes ont quelque chose à faire ici ! Elles réparent le sol : selon certains auteurs, il peut s'agir d'un sol trop tassé en profondeur, de matière organique enfouie qui n'arrive pas à se décomposer, d'un sol trop chargé en azote ou encore d'un sol qui n'arrive pas à éliminer l'excès d'eau, ... Pour les aider, tapissez le sol d'une épaisse couverture (20cm) de paille ou autres débris biodégradables. Cela apportera l'aide de la vie du sol (verres de terre notamment). Il semble que de semer d'autres plantes à fort enracinement (luzerne, panais, salsifis, ...) puisse aider le travail réalisé et même remplacer les plantes. Je ne l'ai pas personnellement expérimenté. Il arrive que d'une année sur l'autre les plantes disparaissent. Simplement faucher les lorsqu'elles sont en fin de floraison si elles envoient des graines ailleurs ou si vous avez choisi de faire votre potager parmi elles. Notez qu'un labour peut aggraver les choses.

Si les plantes sont isolées dans votre potager : laissez les vivre et servez-vous en comme producteur de couverture fraîche que vous récoltez à la façon de la luzerne. Evitez simplement qu'elles grainent. Ces plantes vivaces ont souvent un enracinement profond, elles remontent donc des minéraux du sous-sol qui vont se retrouver dans leurs feuilles. Elles participent à la diversification de vos cultures. Voilà un autre regard sur le chardon ! :-), c'est travailler avec la nature et non contre elle.

Complétons ces quelques repères avec Emilia Hazelip et Jean-Marie Lespinasse
- Emilia Hazelip  : vidéo « CULTURE EN SYNERGIE SUR BUTTE »,
  (en vente sur http://aupetitcolibri.free.fr )

- Jean-Marie LESPINASSE  : livre « JARDIN NATUREL » aux éditions du Rouergue.

Note : si vous manquez de repères pour commencer votre tout premier potager, regardez les plants qui se vendent sur les marchés de producteurs biologiques ou en magasins d'alimentation biologiques, commandez un catalogue de graines biologiques (BIAUGERME, on y trouve des conseils pour chaque légume) et achetez un livre de jardinage biologique classique (par exemple « JARDIN BIOLOGIQUE » de Jean-Paul THOREZ aux éditions Terre Vivante, il donne une fiche complète par légume).


Il vous faudra peut-être un peu de temps pour assimiler tout ça.

Le dernier conseil que je vous donne est le suivant : LANCEZ-VOUS et acceptez les échecs, ils préparent vos réussites futures !



    Bon jardin !
            
    Richard Wallner - janvier 2009

La production alimentaire


Extrait du livre de Patrick Whitefield, CREER UN JARDIN-FORET, Editions Imagine Un Colibri

Pour répondre à cette question, il nous faut tout d’abord regarder d’où vient notre nourriture actuellement. Elle provient tout simplement d’un puit de pétrole.



Un problème…






Notre système de production alimentaire est devenu tellement dépendant du pétrole qu’au moment où un aliment arrive dans notre assiette, pour chaque calorie d’énergie de cet aliment, environ dix calories de carburant fossile ont été dépensés pour sa production. Ceci inclut l ‘énergie utilisée pour faire avancer les tracteurs et pour les fabriquer, celle nécessaire aux autres machines, la fabrication des engrais et autres produits chimiques, le transport des aliments, leurs transformation, le commerce en gros, le commerce de détail, l’aller-retour entre le supermarché et la cuisine.

Ce rapport de 10 pour 1 est une moyenne.
On a calculé que le coût énergétique d’une mangue du Kenya, mangée à Londres, représente 600 fois l’énergie contenue dans le fruit.


Il ne s’agit pas seulement d’un gaspillage prodigieux d’une ressource limitée mais c’est également une des principales causes du réchauffement climatique.Chaque goutte d’énergie fossile que nous brûlons augmente le taux de dioxyde de carbone dans l’atmosphère. En outre, chaque étape de la production alimentaire génère une pollution,de l’infiltration de nitrates dans la nappe phréatique dans les zones d’agriculture intensive suremballage des produits de supermarché.

Outre les dépenses énergétiques et la pollution, notre nourriture implique des coûts humains et écologiques souvent ignorés. Une partie de nos aliments vient des tropiques. Outre les fruits exotiques, il s’agit du soja et d’autres aliments protéines avec lesquels nous alimentons nos animaux d’élevage pour produire notre viande, nos oeufs et notre lait.

Généralement ces denrées sont cultivées sur des terres qui pourraient fournir de la nourriture aux populations locales. Celles-ci sont alors forcées de migrer vers des bidonvilles à la périphérie des villes ou de cultiver des terres en pente mal adaptées qui souffrent de l’érosion des sols dés que la couverture boisée est éliminée, laissant la terre et les hommes démunis. La majorité du soja est cultivée en Amérique du Sud sur des terres qui ont été reprises à la forêt.


Je ne dis pas que l’industrie agro-alimentaire est plus destructrice écologiquement que n’importe quelle autre. Mais l’alimentation est une chose dont nous ne pouvons pas nous passer et que beaucoup d’entre nous ont la possibilité de produire pour eux-mêmes.



…….et une solution





Tous ces coûts peuvent être évités en cultivant sa propre nourriture dans son jardin. Il ne s’agit pas de viser l’autonomie alimentaire totale, mais tout ce que nous parvenons à produire sera soustrait au processus destructeur de la production alimentaire industrialisée.


Peut-on pourtant espérer que les potagers pourraient remplacer l’agriculture comme première source de production alimentaire pour les populations urbaines ? Une partie de la réponse a été suggérée par un rapport intéressant baptisé The Garden Controversy ( la controverse du potager ), publié en 1956. Les auteurs ont conclu que la production alimentaire moyenne d’un mètre carré de la banlieue de Londres était identique à celle d’un mètre carré d’une surface agricole à haut rendement. Il s’agissait d’une comparaison en termes de valeur monétaire, le poids de la production potagère de banlieue  atteignait seulement la moitié de celle de la surface agricole mais elle était évaluée au prix de vente au détail alors que la production agricole l’était au prix de production.

Quoiqu’il en soit ce fût une découverte remarquable, d’autant que seuls 14% de la surface étaient consacrés à la culture des fruits et légumes, le reste étant laissé aux zones habitables, aux pelouses, aux fleurs, aux chemins et aux voies d’accès. Cela signifie que les potagers produisaient trois fois plus que les terres agricoles, en terme de poids, si l’on considère la surface effectivement utilisée pour la production potagère. Si une plus grande surface avait été consacrée aux potagers, les banlieues surpasseraient largement les exploitations agricoles. Le jardinage est intrinsèquement plus productif que l’agriculture pvrcequ’il peut bénéficier d’une plus grande attention pour des surfaces plus petites.